vendredi 28 novembre 2008

Retrait de l'amendement 138: une belle leçon de démocratie européenne !

Ce qu'elle n'a pu obtenir de la Commission Européenne, la Présidence française de l'U.E. l'a obtenu du Conseil (des Ministres) de l'Union Européenne.

Ainsi, l'amendement 138, adopté par 88 % des députés européens, soutenu par la Commission, se voit évincé par une assemblée de ministres.

Jolie conception de la démocratie où les ministres appliquent les lois et les adoptent au besoin lorsque les Parlementaires sont un peu rétifs, en violation flagrante du principe de séparation des pouvoirs !

Mme Albanel, qui n'avait cessé d'affirmer qu'il n'y avait aucune contradiction entre cet amendement et la loi Création et Internet pousse pourtant un "ouf" de soulagement dans un communiqué au ton guerrier.

Ce projet de loi fait cependant l'objet de vives critiques de la part de la Commission, notamment sur la violation de certains droits fondamentaux.

Le gouvernement réussira-t-il à faire passer sa loi à l'Assemblée avant que les députés européens ne rétablissent, comme ils en ont bien l'intention, le fameux amendement ?

Affaire à suivre.

Et pendant ce temps là, le droit à la copie privée offert par le magnetoscope WizzGo est écrasé sous près de 500.000 euros d'amende... Ecoeurant !

Source: Numérama et Libé

mercredi 26 novembre 2008

Encore une nouvelle menace

Décidément, notre gouvernement est d'une créativité sans borne pour venir "au secours de la création".

A lire cet article de Numérama, ça fait froid dans le dos comme projet de société 2.0 !

mardi 4 novembre 2008

Loi Hadopi et démocratie

Relativement éclipsée dans le traitement de l'actualité, la loi Hadopi continue son chemin.

Elle vient de franchir la barrière du Sénat avec une surprenante facilité et s'apprête à passer à l'Assemblée Nationale en janvier prochain.

Pourtant, comme on l'a dit dans les billets précédents, le vote par le Parlement de l'amendement 138 au Paquet Telecom ("aucune restriction aux droits et libertés fondamentales des utilisateurs finaux ne doit être prise sans décision préalable de l'autorité judiciaire en application notamment de l'article 11 de la charte des droits fondamentaux") aurait du torpiller définitivement cette loi qui confiait la "riposte graduée" a des sociétés privées et la sanction à une autorité administrative.

Nicolas Sarkozy a d'abord tenté d'obtenir la suppression de cet amendement du Président de la Commission Européenne, José-Manuel Barroso et essuyé un refus poli mais ferme:
" Rappelant que l'amendement a été adopté par 573 voix contre 74, la Commission européenne indique dans un communiqué qu'elle "respecte cette décision démocratique du Parlement Européen". Allant plus loin, elle ajoute que selon son propre point de vue, "cet amendement est un rappel important des principes juridiques clés inhérents à l'ordre juridique de l'Union Européenne, particulièrement au regard des droits fondamentaux des citoyens". (...) la Commission estime que "la formulation de l'amendement est rédigée délibérément pour pour laisser aux Etats Membres la possibilité d'atteindre un juste équilibre entre plusieurs droits fondamentaux, à savoir le droit au respect de la vie privée, le droit à la propriété et à des voies de recours efficaces, et le droit à la liberté de l'information et de l'expression. (...)
Elle rappelle qu'il faudra un accord entre le Parlement et le Conseil pour que le Paquet Télécom entre en vigueur, ce qui annonce un possible bras de fer entre les deux organes européens. La Commission se propose simplement de faciliter les débats si le Conseil décidait de demander la suppression de l'amendement."
http://www.numerama.com/magazine/10791-Riposte-Graduee-Barroso-dit-non-a-Nicolas-Sarkozy-MAJ.html

Voila qui souligne bien de manière très concrètes le conflit entre plusieurs droits fondamentaux et le fonctionnement original des institutions européennes et notamment le caractère très particulier du Parlement européen qui ne détient pas la totalité du pouvoir législatif puisqu'il doit le partager avec... les ministres (pouvoir exécutif ! ) qui siègent au conseil de l'UE, violant ainsi le principe fondamental de la séparation des pouvoirs.

Nicolas Sarkozy a donc décidé de passer en force en déclarant, en pleine crise financière, l'urgence sur ce texte.
Il a été adopté au Sénat en moins de 24 heures
http://www.numerama.com/magazine/11215-Le-Senat-adopte-la-loi-Creation-et-Internet-en-moins-de-24-heures.html http://www.senat.fr/dossierleg/pjl07-405.html avec le soutien des sénateurs socialistes alors qu'il viole l'amendement 138 déposé par l'eurodéputé socialiste Guy Bono...

Du coup, l'association "La quadrature du Net" qui s'était déjà beaucoup mobilisé au moment du vote de l'amendement 138 repart au combat:
http://www.numerama.com/magazine/11241-Hadopi-la-Quadrature-du-Net-exhorte-le-Parti-Socialiste.html
Et l'on redécouvre opportunément l'avis "confidentiel" très négatif porté par la CNIL sur le projet: http://www.numerama.com/magazine/11236-La-CNIL-en-appelle-au-Conseil-Constitutionnel-pour-censurer-l-Hadopi.html
http://www.ecrans.fr/Hadopi-Les-critiques-tres-dures-de,5588.html

On ne peut que s'interroger face à un tel acharnement et espérer que la société civile s'empare de ce débat afin d'empêcher l'adoption de cette loi liberticide !

samedi 27 septembre 2008

Une avancée majeure ?

Les derniers jours qui viennent de s'écouler ont été très riches en évènements concernant le web 2.0 et son avenir.

Jeudi 25 septembre, tout d'abord, une décision majeure, l'adoption par une large majorité (573 pour, 74 contre) de l'amendement 138 dans le cadre du projet de Paquet Telecom par le Parlement européen.

Défendu par de nombreuses associations avec en pointe La quadrature du Net, cet amendement déposé notamment par l'eurodéputé Guy Bono prévoit:
"en vertu du principe selon lequel aucune restriction aux droits et libertés fondamentales des utilisateurs finaux ne doit être prise sans décision préalable de l'autorité judiciaire en application notamment de l'article 11 de la charte des droits fondamentaux, sauf en cas de menace à la sécurité publique où la décision judiciaire peut intervenir postérieurement."

Une avancée majeure donc qui devrait donc enterrer le très controversé projet gouvernemental de riposte graduée prévue par la loi Hadopi.

Le lendemain, le Parlement européen enterrait également le projet de contrôle/labellisation des blogs de la rapporteuse Marianne Mikko et on apprenait qu'un jugement particulièrement emblématique contre une internaute américaine, Jammie Thomas, condamnée à verser 222 000 dollars pour avoir mis en ligne des fichiers musicaux, venait d'être annulé.

Voilà un ensemble de décision qui, ajouté au recul sur Edvige, ne peut que nous réjouir !
La mobilisation citoyenne, notamment sur le Net, a réussi à éloigner, au moins pour un temps, les menaces les plus directes de la répression numérique.

Cependant, il ne faut certainement pas baisser les bras.

Car comment ont réagi les tenants du tout-répressif ?

Non seulement Mme Albanel, digne représentante de l'UMP, ne renonce pas à son projet mais elle veut en accélérer l'examen au Parlement en l'inscrivant en urgence.

En effet, la commissaire européenne chargée du dossier,
Viviane Reding, en charge de la société de l'information et des médias, a affirmé mercredi vouloir, dans le cadre du processus de co-décision, retirer l'amendement 138 voté, pourtant à une confortable majorité.

Outre le fait que cela démontre toute l'ambiguïté démocratique des institutions de l'UE qui autorise une commissaire nommée, et non élue, à supprimer un amendement voté par une large majorité de députés élus par les citoyens européens, on voit à quel point les relais des partisans du tout-répressif sont puissants.

Pourtant, les exemples européens nous montrent à quel point cette solution n'est ni possible, ni efficace, ni souhaitable !

mardi 16 septembre 2008

Mobilisation (s)

Deux billets de Numérama soulignent que, décidément, le temps est à la mobilisation dans les deux camps.

Tandis que plus de 100 organisations du monde entier se mobilisent pour dénoncer l'opacité dans laquelle se négocie le futur traité anti-contrefaçon (ACTA), les ayants-droits font monter la pression sur le parlement européen dans le cadre du Paquet Telecom pour obtenir la collaboration obligatoire des F.A.I. dans la lutte contre le piratage...

D'un côté, des lobbies qui s'activent dans l'ombre pour peaufiner un traité mondial "aux p'tits oignons" que l'on déclinera ensuite, subsidiarité oblige, à l'échelle de l'U.E. puis de chaque Etat.

De l'autre, une constellation d'organisations qui tentent de rendre public le débat autour de ces questions.

Au milieu, faut-il encore s'en étonner, le silence assourdissant des grands médias et des politiques sur ce qui est pourtant un enjeu fondamental de société !

En attendant qu'ils viennent nous donner des leçons dans quelques mois, comme pour l'affaire Edvige...

samedi 13 septembre 2008

Edvige, CNIL et vigilance citoyenne

Depuis quelques jours, Edvige est partout, sa dénonciation unanime.

On n'en finirait pas de relayer les articles.

Le plus étonnant est ce culot d'acier qui autorise un certain nombre de politique à se poser en sauveur face à des milliers de citoyens, dont nous sommes, mobilisés activement depuis plus de deux mois, au moment où aucun politique ne se sentait concerné...

Et rare sont ceux qui rappellent le rôle essentiel de la mobilisation citoyenne sur Internet...

Car qu'entend-t-on de la part de nos politiques, y compris le Président ?
On a été un peu trop vite, un peu trop loin, trop peu de concertation, de réflexion préalable...

On remarquera cependant que peu d'entre eux remettent en cause le principe même de fichage politique... Il est vrai que l'amour des fichiers n'est pas récent comme le rappelle Rue 89.

Et qui aurait du être le garant de cette réflexion, cette concertation, ce garde-fou ?
La CNIL.

C'est donc avant tout une faillite totale de cet organisme qui se cache derrière le petit doigt que constitue la publication du décret Edvige qu'elle aurait arraché...

On relaiera ici l'excellent article de l'avocat David Forest dans Libé:
La Cnil ou l'illusion d'un contre-pouvoir.

Un appel à la lucidité et à une reprise en main citoyenne !

mardi 2 septembre 2008

Edvige: médias et politiques sortent enfin de leur léthargie

C'est sûr, c'est vraiment la rentrée.

Enfin, médias et politiques se réveillent et (re)découvrent notre amie Edvige.

"Le Monde" y consacre son éditorial et relaie la prise de conscience de l'opposition en rappelant l'histoire de ce fichier et de la lutte initiée par les associations dès Juillet.

"Libé" s'y met aussi avec l'interview de la secrétaire générale du syndicat de la magistrature.

"Marianne" n'est pas en reste avec cet article qui explique notamment la prise de position de François Bayrou sur France-inter ce matin et élargit le débat à la petite soeur Cristina.

Saluons ce réveil salutaire et espérons qu'on n'oubliera pas non plus le grand frère Périclès...

vendredi 29 août 2008

Free part en guerre contre la loi création et internet

Un billet très intéressant chez Numérama.

On y apprend d'abord, de la bouche du patron de Free, la façon très "novatrice" avec laquelle ont été négociés les accords Olivennes qui ont fourni la base à la future Loi création et Internet:

"...Ils ne nous voyaient jamais tous ensemble. Nous étions tous vus dans notre coin, on nous faisait une lecture [du texte] sans copie et on disait est-ce que c’est bon ou ce n’est pas bon. Puis tout le monde disait "on veut modifier ça.

"On pensait le lendemain avoir une version condensée puis lorsqu’on est arrivés à l’Élysée, on nous a dit "non, mais vous l’aurez l’après-midi"

"On l’a finalement découvert dans le communiqué de presse du soir même. Donc tout le monde a signé un document différent. C’est le mérite ou la force de Monsieur Olivennes qui est plutôt brillant puisqu’il a réussi d’obtenir pour la première fois la signature de tout le monde sur une feuille blanche, je vous le concède, mais à obtenir la signature de tout le monde. Ce qui est déjà très méritoire."

Ensuite, Xavier Niel prend officiellement ses distances avec les mesures envisagées:

"Hadopi n’est pas aujourd’hui une bonne loi pour les Français. S’il s’agit de préserver les intérêts de quelques artistes qui gagnent beaucoup d’argent, ça n’a peut-être pas grand sens."

"Nous, notre avis est qu’on peut faire beaucoup de choses, mais il faut que ce soit un juge qui regarde ce que vous faites, la manière dont vous le faites ; il ne faut pas de manière systématique qu’on essaye d’écouter tout ce qui se passe sur le réseau, sur ce que font nos abonnés".

Et d'affirmer que Free n'a pas fait et se refuse à faire les tests de filtrage prévus.

Revient aussi sur le devant de la scène la fameuse licence globale:
"Redéfinissons un certain nombre de choses, reprenons la licence légale, étudions un certain nombre de solutions alternatives..."

Le refus de concéder à Free une licence 3G y est sans doute pour beaucoup.

Cependant, on ne peut que se satisfaire de cette prise de position et espérer que les autres opérateurs suivront afin que s'ouvre enfin un vrai débat sur ces questions.

mardi 26 août 2008

Edvige, Facebook, même combat ?

Dans la presse de ces derniers jours, deux articles sur le fichier Edvige et sa soeur Critina.

Le JDD rappelle les actions menées contre le fichier et décrit fort bien son fonctionnement et les divers questions qu'il soulève.

On apprend d'ailleurs au passage que "créé par décret du ministère de l'Intérieur le 1er juillet (...) sa mise en oeuvre a aussitôt été gelée, le temps de faire quelques ajustements techniques et de purger le contentieux administratif."

Un recours doit être déposé devant le conseil d'Etat cette semaine.

Dans la rubrique écrans de Libé, le point de vue de Vincent Dubief, avocat au barreau de Paris, souligne la contradiction qu'il y aurait entre la mobilisation contre Edvige et la tendance à livrer des parts de plus en plus large de sa privée sur Internet, notamment à travers Facebook.

Dans les deux articles, on retrouve un argumentaire classique:

1/ Ce genre de fichier n'est pas nouveau:

"En fait, Edvige n'est jamais que l'ancien fichier des RG adapté aux évolutions de la société", explique Gérard Gachet, le porte-parole de la ministre de l'Intérieur, Michèle Alliot-Marie.

2/ Les internautes livrent eux-mêmes les informations collectées dans Edvige:

"... le plus souvent, les informations les plus intimes publiées sur Internet n’ont pas été révélées par quelques paparazzi en mal de scoop, ni pas d’obscures officines, mais par l’intéressé lui-même ! Ce phénomène a d’ailleurs récemment conduit le président de la Cnil, Alex Türk, à s’interroger sur le point de savoir si la vie privée n’était pas devenue une espèce en voie d’extinction à l’heure où « chacun se dévoile sans complexe sur Internet, révèle ses goûts, ses opinions politiques, ses préférences sexuelles, son réseau d’amis…"

3/ La relativisation du libre choix:

" Peut-être supporte-t-on mieux le fichage privé car dans un cas, il y a consentement, et pas dans l’autre ? Oui… mais ! Il reste en effet à prouver qu’un jeune de 15 ans qui dévoile sur un réseau social ses opinions politiques et ses préférences sexuelles est vraiment consentant au traitement de telles données parce qu’il a accepté, sans les lire, trente pages de conditions d’utilisation écrites en anglais ! N’est-ce pas aussi critiquable de se passer de consentement que de l’obtenir par la ruse ?
"

4/ La relativisation de la différence Etat/privé:

"Doit-on en arriver à la conclusion que le fichage « privé » fait moins peur car il n’émane d’aucun gouvernement ? Cela serait bien naïf de croire que les frontières des bases de données privées soient si étanches, ou que les services de renseignement ne soient pas assez professionnels pour récolter l’information de la meilleure façon qu’il soit… "


Pourtant, on ne peut mettre sur le même plan:

  • La collecte d'informations de la part d'entreprises privées et la collecte d'information par l'Etat.
  • La collecte d'informations à destination commerciale et la collecte d'information à des fins de contrôle social.
  • La divulgation volontaire d'informations personnelles à laquelle on peut mettre un terme lorsqu'on le souhaite et le piratage des données.
En mélangeant tout de la sorte, cela revient à dire que dès que l'on a adhérer à un réseau social, on accepte tacitement la suppression pure et simple de toute notion de vie privée !

Or, en démocratie numérique, .l'usager doit rester maître de ses données

mercredi 20 août 2008

Des nouvelles inquiétantes

A la une ce matin, des informations pas très rassurantes.

Sur le site Numérama, deux billets sur la répression numérique:

"5 éditeurs de jeux font du chantage à 25.000 pirates présumés" où l'on apprend que des éditeurs de jeux, dont le marché est pourtant florissant, n'hésitent pas à faire chanter des internautes sur la base d'un listing d'adresses IP fournit par une société douteuse.

"Les éditeurs préviennent qu'ils porteront rapidement plainte contre les 500 premiers internautes qui ne répondent pas favorablement à leur lettre avec un chèque de 300 livres. Ils seront aidés dans leur chantage par une décision de la justice britannique, puisque Isabela Barwinska, une mère de deux enfants au chômage, a été condamnée à payer 16.000 livres sterling (20.200 euros environ) pour avoir téléchargé le jeu Dream Pinball de Topware..."

Dans le même esprit, une internaute américaine a "
accepté de payer 6.050 dollars à l'Association américaine de l'industrie du disque (la RIAA) (...) Elle devra payer 110 dollars par mois pendant 55 mois, jusqu'en février 2013."

Voilà qui devrait faire réfléchir alors que la loi Hadopi devrait passer devant le Parlement à la rentrée...

Dans la rubrique "écrans" de Libé, la manifestation de colère des blogueurs turcs lassés des multiples tracasseries de la censure.

Qui a dit que le Net était par nature un espace de liberté... ?

vendredi 15 août 2008

Deux visions

Deux informations qui s'entrechoquent ces derniers jours.

Dans cet article d'Agoravox, des information sur une proposition de loi qui surfe encore une fois sur la légende noire d'internet.

Il s'agit de porter de 3 mois à 1 an le délai de prescription pour diffamation.

Justification: "En démultipliant sa diffusion, en la dispersant sur de multiples supports, la communication par Internet donne un poids énorme aux propos diffamatoires. Mais cette dispersion rend extrêmement difficile la découverte de ces propos par les principaux intéressés : les victimes diffamées."

Aucune contradiction évidemment entre "le poids énorme" apporté par Internet aux propos diffamatoires, un poids tellement énorme que la découverte par la victime est "extrêmement difficile"... ;-))

En réalité, l'objectif est ailleurs:
"Internet modifie en profondeur les méthodes de communication et leur portée. Nous constatons régulièrement que des pratiques abusives mal encadrées par la législation peuvent être à l’origine de dommages sérieux pour des concitoyens."

Le but, c'est bien de légiférer l'Internet...

Lu dans la rubrique Ecrans de Libé, cet article qui explique qu'en Allemagne, dans le même temps, les procureurs renoncent à poursuivre les "petits pirates" à usage personnel car ils sont dans l'incapacité de faire face à la multiplication des plaintes...
"Rien que pour le premier semestre 2008, à son parquet, il y a eu 25 000 plaintes pour violation du droit d’auteur."

Multiplier les lois impossibles à appliquer, voilà qui traduit une belle incapacité à comprendre les changements en cours...

On conseillera à nos politiques la consultation sans modération de l'excellent site de Michel Cartier.

Vie privée, publicité et financement du Web 2.0


Un article paru dans la rubrique écran de Libé évoque les problèmes posés par la collecte de données opérées par les régies publicitaires des majors comme Google ou Yahoo et évoquée dans ce précédent article.

La possibilité toute nouvelle de désactiver les publicités ciblées chez Google et Yahoo répond aux critiques quant à la violation de la vie privée et notamment "... à une lettre envoyée, le 1er août dernier, par quatre membres du Congrès à trente-trois entreprises du secteur Internet, dont Google, Microsoft, Yahoo et Comcast."

Que penser de cette mesure ?

D'abord, comme le rappelle l'article, supprimer la publicité ciblée ne signifie absolument pas la fin de la collecte des données.

Ensuite, catastrophisme ou pas, Yahoo a immédiatement dénoncé la remise en cause du modèle économique du 2.0 gratuit : « c’est grâce au modèle publicitaire que des contenus et services Internet sont disponibles à des millions de personnes ».

En effet, la publicité ciblée constitue le haut de gamme. Ce qui pose effectivement le problème du financement d'une partie du Web 2.0.
Comme on l'avait déjà évoqué, le deal actuel est bien:
autorisation d'utiliser les données personnelles à des fins publicitaires contre gratuité des services et applications.

Quel est le véritable objectif de ce tout nouvel intérêt des politiques pour la protection des données au moment où une série de texte s'apprête à autoriser l'Etat à s'y immiscer largement ?
Notre protection ?
Ou bien mettre en difficulté le modèle de financement du Web 2.0 ?

Car la publicité constitue au final un mode de financement collectif:
Evidemment, rien n'empêche d'imaginer un mode de financement collectif qui ne contraigne pas chacun à "vendre" ses données personnelles afin d'être inondé de publicité.

Car rien ne permet de savoir jusqu'à quand les entreprises accepteront de verser cette manne publicitaire dont l'efficacité reste à prouver

Cependant, la démarche actuelle des politiques qui remettent en partie en cause ce modèle ne me semble pas s'orienter vers ce type de réflexion...

lundi 11 août 2008

Typologie de la frontière dans l'espace numérique


Accéder sans limite aux sites et aux blogs de l'ensemble de la planète, se déplacer virtuellement tout autour du globe grâce à Google Earth par exemple, se promener dans les villes chinoises, regarder les webcams...

Tout ceci a entretenu et entretient encore l'illusion d'un espace numérique sans frontières donc libre voire incontrôlable.

Il est vrai que les frontières de l'espace numérique sont d'une tout autre nature et coïncident fort peu, pour l'instant, avec les frontières terrestres.

Comme pour la frontière terrestre, on pourrait résumer la frontière numérique à deux éléments clés:
Qui
peut entrer/sortir ? Qu'est-ce qui peut entrer/sortir ?

Dans l'espace numérique, le Qui peut se résumer à trois proposition: Un seul, un Groupe, Tout le monde.

Le Quoi va tourner autour des notions de droits de Lecture/Ecriture.

En combinant le Qui et le Quoi, on obtient ainsi 9 types de frontières numériques que l'on peut représenter sous forme de chorèmes:


On aurait pu distinguer entre lecture simple et possibilité de léchargement.
Cependant, outre le fait que de nombreux outils existent pour capturer des données non téléchargeables, l'intérêt de capturer en local des données en accès libre est de moins en moins pertinent au fur et à mesure que les possibilités d'un accès quasi-permanent au réseau se multiplient, exception faite des données disponibles pour un temps limité.

Car le temps constitue bien une dimension supplémentaire de cet espace numérique dont il faut tenir compte. Les articles du quotidien "Le Monde" par exemple sont en libre accès pendant quelques temps avant de passer en lecture réservée.

On le voit, les frontières existent bien en espace numérique mais elles coïncident rarement avec les frontières terrestres puisque que ce sont les responsables de chaque portion d'espace numérique qui en déterminent la nature.
Je décide seul de ce que je place en accès libre ou réservé, des droits que je donne pour modifier un Google Document...

D'où cette illusion de liberté totale avec ses atouts mais aussi ses excès puisque l'on est en mesure de placer en libre accès des données qui sont en accès réservé comme le font les adeptes du Peer2Peer lorsqu'ils mettent en ligne un DVD ou un logiciel. On est donc en mesure de changer le type de frontières intégrées dans les données par leurs créateurs.

Illusion de liberté car, comme on l'a dit dans le billet précédent, si cet espace est immatériel, les serveurs et les ordinateurs des hébergeurs sont bien localisés sur Terre et dépendent nécessairement de la juridiction d'un ou de plusieurs Etats.

Les Etats peuvent intervenir à plusieurs échelons:

Contre les hébergeurs, sur lesquels la pression augmente. OVH vient ainsi d'affirmer qu'il supprimera immédiatement tout site signalé comme hébergeant des contenus illégaux.

Sur les FAI, qui peuvent être contraints de filtrer en interdisant l'accès à certains sites ou de livrer l'identité qui se "cache" derrière telle adresse IP afin de se retourner contre l'usager.

Sur le "véhicule", que ce soit le bridage/filtrage intégrés dans le matériel, dans le système d'exploitation ou certains logiciels imposés.

D'où l'importance du débat actuel sur les tentatives de contrôles du Net tant à l'échelle nationale qu'européenne ou même mondiale avec l'ACTA.

dimanche 10 août 2008

Esquisse d'une géographie de l'espace numérique


On commencera d'abord par une précision: Les réflexions qui vont suivre n'émanent pas, loin s'en faut, d'un spécialiste mais juste d'un simple utilisateur qui vit les transformations et tentent d'y réfléchir.

Qu'on l'appelle Web participatif, Web 2.0 ou tout autre étiquette, il est indéniable, quelles que soient leurs limites, que les nouvelles pratiques induites par les outils 2.0 apportent un changement de modèle.

Même si des utilisateurs n'utilisent encore Internet que comme un super-minitel, pour la messagerie ou pour consulter des informations, il n'empêche que le nombre de ceux qui deviennent aussi (co)créateurs de contenu (blogs, diaporamas, musiques, photos, vidéos...) explosent et les données en ligne aussi.

Un gigantesque univers numérique est en création et l'on peut en visualiser l'expansion en regardant simplement tourner le compteur de l'espace de stockage sur la page de GMail.

A la différence de l'espace terrestre ou euclidien, cet espace numérique ne se mesure pas en mètre ou en kilomètre mais en kilo, méga, giga ou teraoctets.

Hébergé localement dans nos ordinateurs, d'abord dans les disquettes ou mémoires de quelques centaines de Ko, désormais dans des disques durs ou mémoires de centaines de Go, cet espace numérique s'étend surtout et de plus en plus en ligne, sur les serveurs des hébergeurs.

Ceux-ci constituent autant de continents ou de galaxies dont on trouve d'ailleurs des tentatives de cartographies comme ici ou .
















Source: www.ouinon.net

Pour naviguer dans cet espace, l'ordinateur fait office de véhicule. Et pour sortir de l'espace local qui constitue le "domicile numérique", les réseaux, filaires ou non, constituent autant d'autoroutes qu'il faut emprunter en passant par un F.A.I. qui est la barrière de péage.























L'expansion fulgurante et permanente de cet espace numérique combiné à la généralisation de l'accès haut-débit a permis de dépasser la simple consultation descendante d'informations en ligne.

Accessible de partout, dès lors que je dispose d'un point d'entrée au réseau, c'est désormais le lieu où je puis accéder non seulement à mon courrier et à des informations mais aussi et de plus en plus à mes données et à mes applications tant personnelles que professionnelles, voire carrément à des systèmes d'exploitation en ligne, que je peux d'ailleurs rendre accessibles à tous ou à un groupe particulier.


L'expansion permanente de cet espace numérique, qui peut laisser croire à son "infinitude", combinée à son aspect principalement immatériel pour l'utilisateur explique que l'on entende souvent parler de "Cloud computing" ou "informatique dans les nuages" pour désigner ces nouvelles pratiques.

Pour les mêmes raisons, certains comme Michel Serres y voit un espace sans frontières.

Dans les deux cas, on nuancera fortement ces affirmations.

D'abord, parce que les serveurs et les ordinateurs qui hébergent cet espace numérique sont bien localisés sur Terre et consomment des ressources que l'on sait limitées.

Ensuite parce que quelles que soient leurs localisations, ces hébergeurs et leurs serveurs dépendent de la juridiction d'un Etat.

Enfin parce que si les frontières de cet espace coïncident rarement avec les frontières terrestres sauf dans certaines dictatures, elles existent bel et bien.
On y reviendra prochainement car elles sont en partie à l'origine de logiques d'organisation spécifiques.

Ces réserves mises à part, cet espace numérique peut donc devenir un immense espace de partage de données. Y compris celles sur lesquelles on n'a aucun droit, avec les problèmes que cela engendre...

Donc un immense espace de coopération.

On modèrera notre optimisme en rappelant cependant que cette accessibilité peut aussi devenir une injonction voire une obligation.

Si je peux accéder à mon espace numérique de travail partout et tout le temps, dois-je pour autant travailler partout et tout le temps ?

Faut-il envisager un droit à l'inaccessibilité ?

Et comment est reconnu ce travail effectué hors de l'espace professionnel ?

On reviendra sur toutes ces questions en commençant par une tentative de typologie de la frontière dans l'espace numérique.

dimanche 3 août 2008

Crise de la mondialisation ?


Deux tribunes publiées dans Le Monde viennent confirmer une intuition posée en fin du dernier billet:

La reprise en main du web 2.0 serait-elle liée à la dérégulation libérale de l'économie mondiale ?

L'économiste Nicolas Baverez, dont je ne partage pas du tout les options politiques, met en avant dans son point de vue ce qu'il perçoit comme un tournant majeur, comme la fin d'une époque:

" L'économie mondialisée est entrée dans un nouveau monde, largement inconnu. Le cycle économique qui débuta en 1979 avec le mouvement de désinflation, l'abandon de la régulation keynésienne au profit des politiques monétaires, l'extension du marché au détriment des Etats, l'ouverture des frontières, est clos. Pour autant, le nouveau cours de la mondialisation reste imprévisible et opaque. D'où la montée des peurs et des pressions protectionnistes, notamment au sein des pays développés - Etats-Unis en tête -, qui connaissent un déclin relatif face aux superpuissances du Sud et sont confrontés au désarroi des classes moyennes, décisives pour la stabilité des nations libres."

Pour lui, cette période que certains appelaient "la mondialisation heureuse" et qui se traduisait par une confiance presque aveugle dans les vertus de la dérégulation est désormais terminée.

C'est un peu le même constat que fait le journaliste du Monde Frédéric Lemaître dans son article sur l'échec des négociations à l'OMC intitulé "les nouveaux égoïsmes mondiaux":

"...l'échec des discussions entamées à Doha en 2001 était prévisible. Il n'en est pas moins passionnant tant il est révélateur des nouveaux (dés)équilibres du monde.

Prévisible. Quand des négociations prévues pour durer trois ans sont au point mort au bout de sept ans, la complexité technique souvent mise en avant par les protagonistes n'est qu'un leurre. Chez nombre de responsables politiques des pays développés, le doute est profond. Faut-il vraiment favoriser les échanges commerciaux quand la Chine inonde la terre entière de produits à bas prix et effraie même les ouvriers de General Motors et d'Airbus ?

A-t-on vraiment intérêt à permettre aux agriculteurs sud-américains de concurrencer ceux du Middle West ? Est-il vraiment judicieux de déstabiliser l'agriculture japonaise pour faire plaisir aux Thaïlandais et aux Indiens ? La plupart des économistes répondent oui, mais les politiques hésitent. L'heure n'est plus au libéralisme triomphant. Chacun à sa manière, George Bush, Nicolas Sarkozy et Silvio Berlusconi illustrent la rupture de la droite avec les idées de Margaret Thatcher ou de Ronald Reagan. L'Américain en venant au secours de Wall Street, le Français en réhabilitant le rôle de l'Etat dans l'économie, l'Italien en confiant les clés du ministère des finances à un Giulio Tremonti, très réservé face à la mondialisation. Ces responsables politiques ont deux bons arguments à faire valoir : leurs électeurs veulent être davantage protégés et l'économie mondiale n'a jamais été aussi florissante que ces dernières années, ce qui prouve bien qu'un accord libéralisant encore davantage le commerce mondial n'est pas indispensable."

Les deux auteurs mettent en avant le doute croissant face aux bienfaits de la mondialisation, perçue désormais comme une menace, et la réaffirmation du rôle de l'Etat.

Si pour Baverez, le déclencheur est la crise économique de 2007, on voit chez Lemaître des racines qui remontent à 2001, année d'un certain 11 septembre...

Que les doutes soient d'origine économiques et/ou politiques, ce désenchantement face à la mondialisation, ce repli égoïste des Etats et cette tentative de réappropriation par les Etats du monde numérique ne reflètent-t-ils pas la même incapacité à "construire du sens sans frontières", expression que j'emprunte à Florence Meichel...

samedi 2 août 2008

Dénigrement 2.0


On peut constater que le Web participatif est l'objet de toutes les attentions en ce moment.

D'un coté, on a déjà recensé un certain nombre de postures politiques potentiellement menaçantes.

Le site d'@si a monté un riche et excellent dossier à consulter sans modération.

On peut aussi voir cet article de Marianne autour de la mission sur "les médias face au numérique" confiée à Danièle Giazzi qui fait un parallèle douteux entre la crise des médias et internet...

Mais une autre tendance est à la mode:
Le dénigrement/désenchantement, par certains de ses acteurs, face au 2.0, coupable de s'essouffler, de ne pas tenir ses promesses...
Voir les liens vers les articles signalés par Florence Meichel ici et sur son blog.

Une idée paranoïaque me vient alors:

En affirmant que finalement, le web participatif n'apporte quasiment rien d'autre que des déceptions, que presque personne ne participe, que le contenu créé est de mauvaise qualité ou sans intérêt...etc
N'est-on pas en train de nous dire que, finalement, cette liberté qui se rétrécit, cela n'a pas tant d'importance ?

Qu'après tout, mieux vaut un peu moins de liberté pour un peu plus de sécurité dans cet espace numérique souvent caricaturé comme un monde sans loi, comme le Far-West ?

Je trouve assez paradoxal que les personnels politiques qui, depuis des dizaines d'années, ont organisé méticuleusement la déréglementation de l'espace mondial, ont abandonné les uns après les autres les outils de régulation que possédaient les Etats au profit des marchés, s'évertuent désormais à introduire des outils de régulation verticale dans le monde numérique.

Comme si l'Etat transférait sur le Web 2.0 son rôle central de contrôle et de régulation qu'il ne joue plus sur l'économie. Car dans toutes les critiques d'Internet et toutes les propositions de contrôle qui en résultent, on cherchera en vain la lutte contre l'évasion fiscale ou la criminalité financière...

L'Etat fait ainsi d'une pierre deux coups:
Il se relégitimise comme régulateur/protecteur d'un fantasmatique "Internet refuge de pirates, de pédophiles, de diffamateurs" et reprend le contrôle d'un espace qui expérimente d'autres logiques d'organisation et de fonctionnement qui pourraient le menacer, lui et les autres corps intermédiaires, notamment les multinationales.

Je reviendrai bientôt sur ces différents aspects.

vendredi 25 juillet 2008

Riposte graduée à l'anglaise ?


Lu ce matin dans Le Monde l'adoption en Grande-Bretagne d'une version adoucie de la riposte graduée au terme d'un accord signé Jeudi 24 Juillet par les FAI.

A noter dans cet article, la mention d'un amendement adopté lors du débat sur le Paquet Telecom et proposé par trois eurodéputés français, Guy Bono, Michel Rocard et Francis Wurtz, destiné à "éviter l'adoption de mesures allant à l'encontre des droits de l'homme, des droits civiques et des principes de proportionnalité, d'efficacité et d'effet dissuasif, telles que l'interruption de l'accès à Internet"

On n'en est pas encore aux Droits de l'Homme numérique mais on s'en rapproche...

jeudi 24 juillet 2008

Les FAI se réveillent ?


Vu ce jour dans la rubrique écran de Libé, la prise de position du patron de Free dans le dernier numéro de Capital.

Xavier Niel se positionne résolument contre cette nouvelle loi:

« nous avons d’abord envie de nous battre contre la loi Hadopi, qui crée une Haute Autorité de lutte contre le piratage sur Internet. Un organisme destiné à donner des coups de bâton sur les doigts des Français » Il poursuit : « économiquement, cela n’a aucun impact sur nous, mais certaines de ses dispositions nous paraissent liberticides. Car ce qui se dessine, en dépit de l’opposition de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, du Conseil d’état et du parlement européen, c’est bel et bien le flicage systématique de nos abonnés. » Avant d’ajouter : « sous couvert du respect des droits d’auteur, mais demain ? »

L'article rappelle aussi la prise de position des FAI précdemment évoqué ici.

dimanche 20 juillet 2008

Logiques horizontale et verticale


Je voudrais développer ici une réponse à un billet posté sur l'excellent blog Transnets de Francis Pisani.

L'auteur y développe, au sujet des frictions entre blogs et journalisme, l'idée d'une collision entre deux logiques:
  • la logique “plate” des blogs (le tissage d’un réseaux de liens, une audience “personnalisée”, qui se construit progressivement par la conversation en commentaires, par la recommandation des uns aux autres et la diffusion de liens. Un processus dont les lecteurs sont les acteurs principaux).

  • la logique “verticale” des médias (qui arrivent sur le net en drainant derrière eux une audience qui se fédère autour de marques et de noms de vedettes, une audience qui reste très anonyme, avec peu d’interactions).
Il me semble que ces deux logiques n'embrassent pas seulement les média mais l'ensemble de la société.

Tentative de définition

On pourrait définir la logique "plate" ou horizontale par les interactions qui existent de façon libre, informelle, entre pairs. Jusque là, ce type de logique était, pour l'essentiel, limité à l'environnement proche. On peut penser au système des petites annonces locales, aux bourses aux échanges, au vide-grenier, aux S.E.L. (Systèmes d'Echanges Locaux) ou tout simplement à l'entraide de voisinage. Tant que ce type d'interactions était limité, les autorités s'en mêlaient rarement, excepté pour les SEL où le fisc y a vu parfois une perte de ressources.

Le développement du Web 2.0 et des outils coopératifs comme les blogs, wikis et autres livres, vidéos ou diaporamas en ligne démultiplient presque à l'infini les interactions possibles, et avec elles la créativité.
Elle permet, virtuellement, la mise en mouvement et la participation de quasiment l'ensemble de la société et une mise en autonomie de l'individu pour peu que celui-ci le veuille et y ait été préparé.
Cette logique horizontale peut et pourra de plus en plus se développer à l'échelle de la planète entière. C'est ce développement qui entre en collision avec la logique verticale.

La logique verticale est celle de l'autorité légale, du normé, validé, diplômé, certifié, celle aussi du hiérarchisé.

C'est celle des autorités politiques, économiques et sociales qui sont souvent des corps constitués intermédiaires représentatifs. Ils sont les rouages de nos démocraties représentatives. Des rouages qui grincent aujourd'hui face au développement de la logique horizontale, souvent perçue comme une menace, comme une perte de légitimation d'une fonction parfois chèrement acquise. On peut penser à la crispation des journalistes mais aussi celles de certains enseignants, ou même des politiques face au concept de démocratie participative.

Vertical contre Horizontal ?

Que propose Marianne Milko sur les blogs ?
Une procédure de validation/certification...

Que demandent les différents projets de contrôle du Web que l'on a évoqué précédemment ?
Normer les logiciels et services accessibles en ligne.

Donc introduire le primat de la verticalité sur la logique horizontale du web coopératif.

Evidemment, au départ, l'objectif semble toujours très bon.
Il s'agit de lutter contre la pédophilie, les atteintes à la vie privée, la diffamation, d'améliorer la qualité de l'information, de sauver la création culturelle...

Mais ne s'agit-il pas avant tout, de la part de ces corps, d'une tentative de protéger et de justifier leurs rôles d'intermédiaires ?

Des défis

Le pire n'étant jamais sûr, comment éviter la dérive en cours ?

L'élaboration d'une déclaration des Droits de l'Homme Numérique ?
Le réseau Apprendre 2.0 y réfléchit ici.

Convaincre les tenants de la verticalité que l'horizontalité n'est pas une menace mais une opportunité ? Oui mais comment ?
En réfléchissant à quoi pourrait ressembler la société issue du métissage de ces deux logiques ?

Les associations travaillant sur ce sujet comme celles mentionnées dans le billet précédent sont malheureusement souvent contraintes à une posture défensive.

samedi 19 juillet 2008

Le fichage Edvige n'a aucun rapport avec l'ordre public


Cet article paru dans le Contre journal de Libé donne la position de Jean-Pierre Dubois, président de la Ligue des Droits de l'Homme (LDH).

On y trouve aussi mention de IRIS et DELIS, deux associations qui, comme La Quadrature du Net dont on a déjà parlé, militent activement sur notre sujet.

vendredi 18 juillet 2008

L'Internet de demain, ou le retour au Minitel... chinois


Un article du site "Les Mots ont un sens" qui fait un point intéressant sur le sujet.

MAJ: L'histoire du blog satirique "93sang30" est accessible sur celui du même auteur hébergé par 20 minutes ici et ce site en parle .

mercredi 16 juillet 2008

Web collaboratif, Google et Microsoft

Il n'y a pas que les politiques qui font planer des menaces sur l'émergence du Web collaboratif.

Tout d'abord, sur cette notion, on trouvera une très bonne mise au point dans cet article d'Internet-Actu.

Comment se positionnent Google et Microsoft ?
Je choisis ces deux entreprises du fait de leur importance et de leur stratégie antagonique.

Face au développement de la "Bureautique 2.0" portée par Zoho ou Google documents par exemple, Micro$oft a pris beaucoup de retard.

Pour sauver sa position dominante acquise avec M$ Office, la stratégie est double.

D'abord se lancer enfin dans la bureautique 2.0 avec Office Live dont l'argument est de faire du web collaboratif en utilisant un "service [qui] fonctionne avec les programmes que vous connaissez déjà" (sic).

M$ joue donc à fond la carte du standard de fait.

Le 2e pan de la stratégie consiste à conserver cette position:
En opposant au standard libre Open Document son propre standard OpenXml que M$ a réussi, non sans peine et sans controverse, à faire normaliser.

En lançant une grande opération en direction des enseignants, notamment ceux responsables du B2i (brevet informatique internet) donc de la formation des futurs consommateurs.

Office 2007 Pro devient téléchargeable gratuitement pour les enseignants (mais reste payant pour les établissements et surtout pour les élèves et leur famille) et tout un environnement est mis sur pied autour du B2i avec le surprenant relais d'associations d'enseignants comme le Café pédagogique ou Projetice.

Microsoft centre donc sa stratégie sur le contrôle et la facturation des outils produisant les données.

A l'opposé, Google offre gratuitement les services et les outils comme Google Maps, Google Earth et autres (voir le Google Pack) et centre sa stratégie sur le contrôle et le traitement des données. L'utilisateur de Google est en effet souvent contraint de céder l'accès et l'utilisation des données produites ou qui transitent via son compte Google.

Avantage de Google sur Microsoft: La gratuité et l'ouverture/adaptabilité de ses outils grâce aux API. Google se rémunèrant sur le traitement, publicitaire notamment, des données.

Alors gentil Google contre méchant M$ ?

Pas si sûr car gratuité ne signifie pas liberté et ouverture.

Et force est de constater l'omniprésence de Google dans une multitude de projets tournant autour du Web coopératif interopérable et sa tendance à utiliser sa puissance financière pour éliminer les solutions libres et ouvertes au profit de ses outils propres.
Je développerai un exemple concret très prochainement.

Quelles garanties avons-nous sur la pérennité de cette gratuité, sur l'accès et le contrôle de nos données ?

lundi 14 juillet 2008

Menaces sur les blogs ?

Le rapport de Marianne Mikko, députée européenne (encore !) a fait beaucoup de bruit.

Il s'interroge sur les blogs et l'opportunité de les encadrer sur le plan législatif.

Comme d'habitude, les objectifs sont louables:
Protéger la vie privée, les droits d'auteurs, lutter contre la diffamation, le lobbying...

Mais les mesures proposées sont perçues par certains comme une tentative de contrôler la blogosphère.

Ce n'est encore qu'un rapport d'initiative qui n'exprime pas le point de vue du Parlement Européen.

Affaire à suivre.

Un article d'Agoravox sur ce sujet.

Loi Création et Internet


Si l'objectif de cette loi est louable, rien de moins que de "sauver la Culture", les moyens utilisés sont totalement disproportionnés et entrent en contradiction avec de nombreux principes démocratiques.

1/ Elle autorise des officines privées à balayer en permanence le réseau à la recherche des fraudeurs, à les identifier auprès des FAI, à centraliser les données et constituer des fichiers.

2/ Elle confie un pouvoir qui ressort de l'autorité judiciaire, dont l'indépendance est garantie par la constitution, à une "autorité administrative".

3/ Elle organise des sanctions automatiques allant jusqu'à 1 an d'interdiction de connexions au réseau pour tout un foyer même si un seul membre est responsable (sanction collective).

4/ Elle condamne sur la base de traces informatiques laissée par une adresse IP dont il revient à l'utilisateur de s'assurer, à ses frais, qu'elle n'a pas été détournée par un tiers malveillant ou mal utilisée par un habitant du foyer.

On rappellera pour conclure que les plus grands fraudeurs seront également ceux qui sauront échapper le plus efficacement à la traque...

Autant de violations des principes démocratiques fondamentaux justifiées par quoi ?
La lutte anti-terroriste ?
Non, la défense des intérêts financiers des majors de la musique et du cinéma...

Pour en savoir plus:
La quadrature du Net (Riposte graduée, un article de Libé)
Des articles de Rue 89: La Loi expliquée aux Nuls 1/3, 2/3.
Le point de vue de la fondation Terra-Nova.

dimanche 13 juillet 2008

Le "Paquet Telecom"


Je m'appuierais essentiellement sur le site La quadrature du Net qui a fait un excellent topo sur le sujet et mène une campagne active.

Le "paquet Telecom" est un projet de réforme du droit européen sur les communications électroniques.
D'après la Quadrature du Net:

" Les internautes européens pourraient se voir interdire des activités licites par des mouchards obligatoires, au nom de leur sécurité. Le droit d'utiliser un logiciel libre pour accéder à internet ne serait ainsi plus garanti. La neutralité du net, elle est aussi directement attaquée, tout comme le principe qui veut que les intermédiaires techniques n'ont pas d'obligation de surveillance a priori des contenus."

D'autres amendements évacuent de facto l'autorité judiciaire en permettant à des autorités administratives d'imposer aux fournisseurs d'accès de collaborer avec les polices privées des producteurs de contenus, notamment dans l'envoi de messages d'intimidation.

L'ensemble va plus loin que le projet français de riposte graduée, pourtant rejeté de toutes parts, y compris par le Parlement Européen le 10 avril dernier."

Imagine-t-on des milices privées (et non les forces de l'ordre) autorisées à fouiller les véhicules circulant sur une autoroute, pouvant exiger de la part de la société d'autoroute l'identité du propriétaire et faire confisquer jusqu'à un an, par une autorité administrative ad hoc (et non l'autorité judiciaire) le véhicule d'un éventuel délinquant ?

Imagine-t-on un constructeur qui imposerait un GPS qui briderait l'usage du véhicule ?

Pourtant, Lundi 7 juillet, tous les amendements dangereux dénoncés mardi 1er juillet par la Quadrature du Net et de nombreuses organisations ont été présentés au vote et adoptés.

Le vote aura lieu fin Septembre.
D'ici là, la Quadrature du Net fournira una analyse détaillée et des moyens pour agir sur vos députés européens.

Affaire à suivre.

Edvige, Big Sister is watching you


Certains auront sans doute entendu parler de notre chère Edvige, d'autres pas. Elle est entrée en vigueur le 1er Juillet dernier.

Il s'agit, je cite le décret, "de mettre en œuvre un traitement automatisé et des fichiers de données à caractère personnel intitulés EDVIGE (Exploitation documentaire et valorisation de l'information générale) ayant pour finalités, en vue d'informer le Gouvernement et les représentants de l'Etat dans les départements et collectivités :
1. De centraliser et d'analyser les informations relatives aux personnes physiques ou morales ayant sollicité, exercé ou exerçant un mandat politique, syndical ou économique ou qui jouent un rôle institutionnel, économique, social ou religieux significatif, sous condition que ces informations soient nécessaires au Gouvernement ou à ses représentants pour l'exercice de leurs responsabilités ;
2. De centraliser et d'analyser les informations relatives aux individus, groupes, organisations et personnes morales qui, en raison de leur activité individuelle ou collective, sont susceptibles de porter atteinte à l'ordre public."

Donc, si l'on comprend bien, ce ne sont pas seulement les personnes "susceptibles de porter atteinte à l'ordre public" qui sont visées mais toute personne susceptible d'exercer une citoyenneté active à laquelle tendent les programmes d'éducation civique.

C'est bien l'interprétation développée dans cet article d'Agoravox

C'est proprement hallucinant qu'un gouvernement quel qu'il soit puisse créer un tel fichier ! Et qui plus est par un simple décret ! Et dans un silence assourdissant !

La CNIL, censée nous protéger, à montré ici toutes ses limites.

Par ailleurs, un autre fichier, Périclès, est prévu par la LOPSI, loi sur la sécurité intérieure.

La loi devrait permettre, entre autre, je cite Le Monde, "à l'avenir, d'introduire dans les ordinateurs des citoyens un "cheval de Troie" informatique. Il sera possible, avec l'aval d'un juge, "sans le consentement des intéressés, d'accéder à des données informatiques, de les observer, les collecter, les enregistrer, les conserver et les transmettre, telles qu'elles s'affichent pour l'utilisateur ou telles qu'il les y introduit par saisie de caractère", et ce pendant une durée de quatre mois, renouvelable une fois. Le dispositif technique pourra être mis en place à toute heure, en s'introduisant dans tout lieu, ou via "la transmission par un réseau de communications électroniques".

Voir la réaction de la Ligue des Droits de l'Homme, celle du syndicat de la magistrature.

Un recours en annulation devant le conseil d'Etat est en cours. Voir ici.

Un site contre Edvige avec une pétition à signer.

MAJ 15/07/08:
Edvige a aussi une petite soeur, Cristina, (“Centralisation du renseignement intérieur pour la sécurité du territoire et les intérêts nationaux”), pour notre nouvelle Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI), fusion des RG et de la DST. On ne sait rien de ce fichier dont on ne connaît l'existence que par la publication au J.O. du laconique "Avis favorable avec réserve" de la CNIL.

Pour plus d'infos, voir ici

Déclaration des Droits de l'Homme Numérique


Pour commencer, un petit rappel historique.

On était en 2000 et c'est l'actuel secrétaire d'Etat à la fonction publique, André Santini, pas un utopiste illuminé, qui publiait un livre blanc qui se concluait par ce texte d'un étonnante actualité: